La bataille que mène l’administration cantonale pour refuser l’étude de la boucle ne peut avoir qu’un objectif : valider son concept directeur, qui comprend les deux phases de l’extension souterraine de Cornavin et la seconde gare sous-souterraine de l’aéroport, avec sa propre desserte par Les Nations.
Pour assurer sa victoire, elle pratique la technique du salami, consistant à engager toute l’affaire en réussissant à obtenir la 1ère phase d’extension souterraine de Cornavin.
Or cette 1ère phase, résultat d’une longue dérive technico-financière, ne sert à presque rien, mais coûte énormément. Il est parfaitement incompréhensible qu’on puisse prétendre que Genève perdrait un milliard de la Confédération si cette 1ère phase tombait à l’eau. Ce que Genève perdrait, c’est la contrepartie de ce milliard, soit, justement, presque rien. Pour ce presque rien, en outre, Genève devrait dépenser un demi-milliard, condition posée par la Confédération pour qu’elle accepte de dépenser son milliard.
L’expertise de 2013
En 2012-2013, un groupement d’experts a étudié la faisabilité d’une extension souterraine de la gare de Cornavin. Voici ce qu’il a proposé.
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Grâce à cette extension, la capacité de la gare de Cornavin passerait selon ces experts de 30,5 départs par heure actuellement à 40 départs par heure, soit une augmentation de 31 %.
Ces experts ajoutent que la capacité de Cornavin à un terme lointain devrait, grâce à un quai et deux voies supplémentaires à la gare souterraine, atteindre 48 départs par heure.
L’étude de 2015
Deux ans plus tard, de nouveaux spécialistes dévoilent une Etude préliminaire EP 2015. Ils proposent ceci :
Par rapport à l’expertise de 2013, cette nouvelle étude fait subir au projet des experts un sévère coup de rabot :
- entre Cornavin et les Charmilles, le tunnel à voie double se réduit à un tunnel à voie unique, et
- entre les Charmilles et la bifurcation à Châtelaine des deux voies de l’aéroport et de celles de La Plaine, la 4ème voie est supprimée.
Alors que le projet de l’expertise de 2013 devait permettre la circulation dans les deux sens entre les jardins de l’ONU et la bifurcation de Châtelaine, y compris bien sûr à travers la gare souterraine de Cornavin, la nouvelle étude n’ouvre le passage sur tout ce tronçon qu’aux trains circulant d’est vers l’ouest.
De ce fait, la capacité de la gare de Cornavin passerait de 30,5 départs par heure actuellement à 33 départs par heure, soit une très modeste augmentation de 8 %. C’est ce que montre l’horaire réticulaire tenant compte de l’extension souterraine de Cornavin, validé par l’Office fédéral des transports.
Pour lire ce schéma : les nombres à deux chiffres indiquent en minutes le temps qui sépare de l’heure pleine le moment du départ de la gare ou de l’arrivée à la gare. Les plus proches du rectangle jaune représentant la gare indiquent les moments d’arrivée à la gare, les plus éloignés les moments de départ.
Pour calculer le nombre de trains qui quittent une gare en une heure, il suffit d’additionner les paires éloignées du rectangle jaune de la gare. Il y en a par exemple 8 à Genève-les Grottes, qui partent tous en direction de l’aéroport.
C’est cette Etude préliminaire 2015 qui fonde toute l’action des autorités fédérale et cantonale :
- la signature le 7 décembre 2015 par les CFF, la Confédération, le canton et la ville de Genève de la convention-cadre qui fixe la répartition entre les parties du financement du projet de la 1ère étape d’extension souterraine de Cornavin,
- les votes par le Grand Conseil et le Conseil municipal de la Ville de Genève des crédits de leur part du financement de cette 1ère étape, en septembre 2016,
- le projet de loi cantonale modifiant la loi sur le réseau des transports publics, déposé le 17 octobre 2018, insérant dans la loi le projet de nouvelle gare souterraine à Cornavin et celui d’une nouvelle liaison Bernex – Cornavin – Aéroport – Zimeysa.
C’est donc désormais parfaitement clair
L’administration veut engager son canton dans de gigantesques dépenses, (5 milliards, dont au moins un demi-milliard à charge des Genevois), d’effroyables chantiers (un 1er milliard à Montbrillant, entre la rue des Gares et la rue Voltaire, puis dix ans plus tard un second milliard au même endroit, puis encore une nouvelle gare sous-souterraine à l’aéroport), des bouleversements de tout l’environnement urbain, de graves atteintes à la politique climatique.
Plutôt qu’une augmentation de capacité de 31 % (40/30,5) l’augmentation n’est que de 8 % (33/30.5), alors que l’objectif poursuivi est de 48 trains par heure, soit une augmentation de 57 % (48/30.5). C’est dire que la 1ère extension de Cornavin ne contribuerait que très modestement à l’accroissement de la capacité du nœud ferroviaire de Genève. Elle ne sert à rien.