Dans le cadre de l’article que le journal du TCS (https://www.tcs.ch/fr/le-tcs/sections/geneve/boucle-aeroport.php) a consacré à la boucle ferroviaire par l’Aéroport du projet de l’Association Genève Route et Rail, son rédacteur a interrogé Monsieur David Favre. Selon ce dernier, «l’Office fédéral des transports et les CFF ont confirmé leur opposition à la proposition essentiellement en raison de son incompatibilité avec le système cadencé suisse».
Les deux cartes reportées ici sont reprises de l'article du journal.
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C’est à la fois juste et faux : l’OFT et les CFF ont effectivement adopté cette attitude, mais : ils l’ont adoptée dans le contexte qui opposait le projet GeReR à l’extension souterraine de la capacité de Cornavin, celle pour laquelle le Canton a décidé de payer 420 millions et la Ville 110 millions. Les cartes réalisées pour cet article sont parfaitement explicites, cette extension souterraine à Cornavin, avec ses accès, est bien représentée en bleu, qui indique l’état actuel, comme si c’était fait, ce que l’association Genève Route et Rail a intégré.
Il faudra maintenant que l’OFT, le Canton, la Ville et les CFF trouvent le moyen de mieux desservir l’Aéroport. Le Canton imagine la « Raquette », pour un coût de 2,0 milliards. On ne sait pas ce qu’imagine l’OFT, son vice-directeur a déclaré lors de son audition par la Commission des travaux du Grand Conseil, en septembre dernier, qu’il avait appris l’existence du projet de « Raquette » une semaine plus tôt. L’OFT n’a donc aucune idée de la façon dont pourra se réaliser une desserte efficace de l’Aéroport. On ne sait si les CFF en ont une, ils n’ont à ce jour rien rendu public.
Le fait que l'OFT ait conduit la mise en place du projet d'extension ferroviaire de la capacité du noeud de Genève sans que son vice-directeur ai eu connaissance du projet de "Raquette" ne laisse pas de surprendre.
Donc, oui, l’OFT et les CFF ont avancé cet argument, mais mal à propos : il faudra bien qu’eux aussi se penchent sur le projet Genève Route et Rail.
Ceci étant, il est absolument évident que l’argument qu’ils avaient avancé ne tient pas debout. Le lecteur intéressé trouvera une analyse détaillée aux pages 10 à 12 de ce document : 2017.01.30 Préparation Plan-cadre CFF.pdf
La boucle raccourcira la longueur du trajet Lausanne – Genève – Lausanne puisque le tronçon Genthod – Cornavin – Aéroport ne sera plus parcouru qu’une fois, et non deux fois comme aujourd’hui. Le temps de parcours minimum de Lausanne – Genève – Lausanne pourra techniquement de ce fait être réduit, mais rien n’oblige à cela. Il tombe sous le sens que la dizaine de minutes qui pourrait être gagnée pourrait aussi ne pas l’être, il suffirait par exemple de ralentir les trains entre Lausanne et Cornavin de 5 minutes, et les 10 minutes gagnées par la boucle sont ainsi compensées par une perte de 10 minutes sur les trajets. Cet exemple sert d’illustration, bien d’autres variantes sont possibles.
Dans cet exemple, le meilleur temps de trajet de Cornavin à Lausanne est ralenti de quelques minutes, certes, mais le meilleur temps de trajet de l’Aéroport à Lausanne est accéléré de quelques minutes. A partir de Lausanne, l’horaire cadencé du réseau suisse ne serait pas influencé par la création de la boucle.
L’affirmation de l’OFT et des CFF, telle que la rapporte Monsieur Favre, étonne pour une tout autre raison encore. Elle part de la constatation, correcte, que le système cadencé souffre d’un défaut bien connu : il ne peut être accéléré que par sauts, il rend impossible le grignotage progressif des temps de parcours. La durée du trajet de Berne à Genève et retour doit en principe se faire en un nombre d’heure entier : aujourd’hui il se fait en 4 heures, le train qui part de Berne à 8 heures le matin se retrouve ainsi à Berne à midi. Et à Berne, selon le principe, tous les trains qui quittent Berne devraient la quitter à une heure pleine, et ceux qui arrivent à Berne devraient y arriver à une heure pleine. Toutefois, le trafic concentré à Berne est si dense que les départs et les arrivées ne sont plus concentrés sur les seules heures pleines, mais aussi sur les demi-heures. Ceci permet d’envisager que le « saut » d’horaire nécessaire pour accélérer le trajet Berne - Genève – Berne ne soit pas d’une heure entière, mais d’une demi-heure seulement.
Et là se produit un miracle : en additionnant le gain de temps que permet la boucle de l’Aéroport et le gain de temps que permettront les nouveaux trains, le temps de parcours de l’aller et retour pourra être réduit de 30 minutes, ce qui permet de gagner 15 minutes dans chaque sens.
Il n’est pas nécessaire d’insister pour faire comprendre le bénéfice des clients du chemin de fer.
Pour les CFF, et ceux qui les subventionnent, un gain de temps de 30 minutes par voyage améliore la productivité de chaque train de 6 à 10 % ! ce n’est pas rien.