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Le blog de Rodolphe Weibel - Page 100

  • Madame la Députée, Monsieur le Député,

    Vous êtes appelés à vous prononcer sur le projet de loi PL 12164, qui ouvrirait un crédit d’étude de 6,3 millions pour financer une première tranche d’étude d’avant-projet de la traversée du lac, du bouclement autoroutier et des mesures d’accompagnement associées.

    Entre 2010 et 2011, l’administration cantonale a étudié la faisabilité d’un contournement autoroutier de Genève par l’est. Elle a publié en mars 2011, sous le titre Rapport de synthèse des études de faisabilité, un dossier qui conclut qu’une traversée du Lac entre Le Vengeron et La Pointe à la Bise, suivie par un zigzag à travers la campagne en rive gauche aboutissant à la douane de Thônex-Vallard, est faisable. Son coût : 2,86 milliards HT,  3,08 TTC si la traversée du Lac se fait en pont, 3,40 milliards HT, 3,65 milliards TTC si la traversée du Lac se fait en tunnel.

    L’administration cantonale a ainsi prouvé la faisabilité de ce tracé, mais n’a absolument pas montré que ce tracé est le plus avantageux. Elle ne l’a comparé qu’avec quelques autres, sommairement esquissés, et la comparaison a porté sur la seule problématique du trafic, mais en rien sur les aspects économiques (pas de comparaison des rapports coûts/avantages des différentes variantes), techniques (est-il vraiment nécessaire que le tracé à travers le lac passe par les vases les plus molles et les plus épaisses de toute la région ? oui, c’est faisable, mais est-ce indispensable ?), écologiques (est-il vraiment nécessaire que le tracé passe par des réserves naturelles importantes ? oui, c’est faisable, mais est-ce indispensable ?), sociologiques (est-il vraiment nécessaire de faire passer le tracé à travers des zones densément habitées, Vésenaz, Chêne-Bourg, Thônex ? oui, c’est faisable, mais est-ce indispensable ?), ou même tactiques ( ce tracé facilitera-t-il les négociations avec Berne ?). RIEN n’a été fait dans ces domaines.

    Deux ans plus tard, la Confédération, dans le cadre de son étude pour résorber l’engorgement de l’autoroute actuelle entre Le Vengeron et Perly, reprend le tracé esquissé par l’Etat de Genève. (La Confédération reprend ce tracé non pas parce qu’elle le trouve idéal, mais parce qu’elle sait que l’Etat de Genève veut celui-ci). Elle arrive elle aussi à la conclusion de la faisabilité, mais moyennant un certain nombre d’adaptations aux contraintes, notamment écologiques et techniques. Ces modifications coûtent très cher. La variante « pont » en traversée du Lac passe de 3,08 milliards TTC à 4,20 milliards (plus 1,12 milliard, plus 36 %), la variante « tunnel » passe de 3,40 milliards à 5,00 milliards (plus 1,60 milliards, plus 47 %).

    La raison officielle avancée par la Confédération pour renoncer à poursuivre son étude de ce projet est qu’il ne dispenserait pas de tout de même devoir élargir l’A1 entre Vengeron et Perly. Elle ne blesse personne.

    Bref.

    Dans son Exposé des motifs, le Conseil d’Etat annonce un coût de 2,86 milliards HT, sans mentionner  que les services de la Confédération sont arrivés à un coût plus élevé de 1,0 milliard, plus élevé de 36 % !

    Madame la Députée, Monsieur le Député, cette différence me semble être d’ampleur suffisante pour susciter votre curiosité. Quel est le montant juste ? Comment s’explique une telle différence ? L’administration en a-t-elle examiné les causes ? Pourquoi ces explications n’apparaissent-elles pas dans l’Exposé des motifs ? Le montant du crédit demandé, de 6,3 millions, est estimé sur la base de l’évaluation cantonale ; qu’en sera-t-il si c’est l’évaluation de l’administration fédérale qui est correcte ? On parle de péage ; si le péage suffit pour financer 3 milliards, sera-t-il également suffisant pour en financer 4 ?

    Madame la Députée, Monsieur le Député, en votant le crédit de 6,3 millions que le Conseil d’Etat vous demande, vous lui accordez de poursuivre vers ce tracé venu de nulle part. Il serait infiniment plus logique, et probablement plus raisonnable, de procéder à une étude comparative des deux tracés envisageables.

    Vous remerciant de l’attention que vous porterez à ce courrier, je vous prie d’agréer, Madame la Députée, Monsieur le Député, mes salutations distinguées.

     

    Rodolphe Weibel

    www.gerer.ch

    2017.06.01 Traversée du lac les 3 projets.ipg.jpg

  • A Genève, ne plus sauter du 3ème étage pour suivre un banquier

    Lorsque la gare de l’Aéroport a été réalisée, il était clair pour tout le monde qu’il s’agissait probablement d’une 1ère étape, qui serait suivie si nécessaire par le prolongement de cette antenne jusqu’à ce qu’elle rejoigne la ligne de Lausanne, pour former ainsi une boucle se prêtant fort bien à une extrémité de réseau (voir en bas de page l’extrait du Journal de Genève du 25 mai 1987). Le besoin s’en étant fait sentir (Léman 2030), l’OFT, le canton et les CFF ont cependant rejeté la solution de la boucle pour préférer augmenter de 4 le nombre de voies à Cornavin. En surface d’abord, ça devait coûter 790 millions, et nécessitait la démolition d’une série d’immeubles du quartier des Grottes. Les habitants ont protesté, trouvé l’appui de politiques.

     

    De leur côté, OFT, CFF et canton ont d’abord affirmé qu’aucune autre solution n’était envisageable. C’était évidemment faux : il y en avait au moins deux autres, une extension souterraine de Cornavin, et la réalisation de la boucle de l’Aéroport. Personne à part moi n’a soutenu la solution de la boucle de l’Aéroport. Tout le monde s’est entendu pour enfoncer les 4 voies en sous-sol, 12 à 15 mètres en-dessous des voies actuelles. Comme ça coûtait très cher, l’extension a été fractionnée en deux étapes de deux voies. La 1ère coûtant 1,67 milliards, la seconde 1,0 milliard encore. L’OFT a un peu triché pour faire passer la contribution votée par le Parlement dans son crédit d’engagement de 790 millions à 1’090 millions, le canton s’est engagé à trouver 420 millions, la Ville 110 millions, le reste passant dans diverses contributions un peu vagues. Bref, le financement de la 1ère étape était réuni.

     

    Reste à trouver le reste du financement. La deuxième étape est évaluée à 1,0 milliard par les experts qui se sont prononcés sur le coût de la 1ère. Ça porte le coût à 2,67 milliards. Mais pour ce montant, ce ne sont jamais que 8 trains par heure qui peuvent parvenir à l’Aéroport, soit les 6 trains de grande ligne et 2 IR. Pas de régional ! Les CFF, l’OFT, et le canton prévoient donc une « Raquette », qui offrirait une nouvelle liaison entre Cornavin et Aéroport, en passant par les Nations. Ça coûterait 2,0 milliards.

     

    Au total, on arrive à 4,67 milliards

     

    Mon projet, qui offre grosso modo les mêmes possibilités de prestations, j’évalue son coût à :

     

    un total de 740 millions,

    soit 1/6ème, soit 4 milliards de moins

     

    Monsieur Benedikt Weibel (nous ne sommes pas parents), ancien directeur général des CFF, estimait dimanche dernier dans la  NZZ à 4 % du coût d’investissement les coûts annuels d’entretien des lignes. Il faudra donc compter pour l’entretien du projet GeReR 30 millions par an, pour celui du projet OFT-CFF-Canton 187 millions.

     

    L’amortissement des investissements, au cours des 50 années qui suivront leur mise en service s’élève à un taux moyen annuel de 2 %. Pour le projet GeReR, 14,8 millions par an : c’est le montant annuel qu’il faudra prélever sur les revenus pour rembourser l’investissement. Pour la solution OFT-CFF-Canton, il faudrait trouver 93,4 millions par an, alors que les prestations seront à peu près les mêmes. Il est évidemment impensable que ce soit réalisable ! La différence entre le coût de la solution OFT-CFF-Canton et le coût de la solution GeReR, 4 milliards, n’est à l’évidence pas un investissement, c’est de l’argent jeté par les fenêtres. Aucun banquier genevois ne se jettera du 3ème étage par la fenêtre pour cela !

      

    Dernières choses : les critiques émises par les CFF :

    1. La boucle, qui permet de réduire le temps de parcours Lausanne-Genève-Lausanne, exigerait de très nombreuses années de travail de titan pour adapter le système cadencé suisse. Cela n’a évidemment aucun sens : parce que le trajet Lausanne-Cornavin-Aéroport-Lausanne sera plus court que le trajet Lausanne-Cornavin-Aéroport-Cornavin-Lausanne, il est au moins une solution minimale possible, qui consiste à un peu ralentir les trains pour effectuer le trajet dans le même temps. Mais bien sûr, il sera possible de faire mieux.
    2. Un direct sur deux (c’est mon idée, mais ça peut se moduler) prendra une dizaine de minutes de plus entre Cornavin et Lausanne en passant par l’Aéroport que le direct ne passant pas par l’Aéroport. C'est juste, mais en revanche, un train sur deux entre l’Aéroport et Lausanne gagnera une dizaine de minutes par rapport à aujourd’hui. Je remarque qu’à ce jour personne ne songe à avoir 4 directs par heure entre Bâle et Berne ni entre Bâle et Zurich.
    3. Les départs de Cornavin vers Lausanne ne seront pas cadencés au quart d’heure, mais groupés par paires toutes les demi-heures. La fréquence sera bien de 4 par heure, celui faisant le détour par l’aéroport arrivera à Lausanne un quart d'heure plus tard que celui qui sera parti au même moment directement vers Lausanne. La conséquence est que l’horaire cadencé au quart d'heure sera respecté à Lausanne et au-delà.

     

    Le lecteur trouvera à cette adresse http://www.gerer.ch/boucle-rive-droite-coup-doeil/  une fiche de deux pages qui présente l’essentiel de la question.

     

    Ici, l'extrait du journal de Genève du 25 mai 1987

    1987.05.25 Journal de Genève Page 16 boucle Bellevue.jpg

     

  • A Rouelbeau

    2017.10.06 Illustration Jonction Rouelbeau nette, sans à côtés.jpg

    Pour agrandir l'image, cliquer sur elle

    http://ge.ch/mobilite/media/mobilite/files/fichiers/documents/31_08_2016_-_seance_dinformations_conseil_consultatif_v02_2.pdf

    Ce photomontage donne une image bucolique de la jonction de Rouelbeau, la 1ère jonction de l’autoroute de contournement de Genève après la traversée du Lac, telle que la prévoit l’administration. Au lointain, les Voirons, au premier plan passant de gauche à droite de l’image, la route de La Capite. Devant le sommet le plus élevé des Voirons, un bosquet, qui abrite la ruine du château de Rouelbeau. A gauche, perpendiculairement à la route de La Capite, une bande claire situe le tracé de l’autoroute, interrompue plus loin par une fosse qu’on devine circulaire : elle cache un giratoire qui se superpose à l’autoroute, enterrée à une douzaine de mètres de profondeur. En sous-sol, 4 bretelles relient l’autoroute au giratoire, qui est lui-même relié à la route de La Capite par la trémie à deux voies aboutissant au giratoire situé à l’angle droite en bas du montage.

     

    Un cabanon le long de la route de La Capite, un motocycliste et une petite voiture, ce pastel inspire le calme et la détente.

    Il ne correspond à aucune réalité. La réalité, la voilà :

    2017.10.06 Trafic par type de trafic Variante 1.jpg

    Source: http://www.ge.ch/dcti/presse/2011-04-11_conf_annexe.pdf, page 16

    Ce graphique présente les flux de trafic attendus du contournement autoroutier de Genève, tel qu’il est prévu par l’Etat. Ce sont 70’000 véhicules qui franchiront chaque jour le lac (j’arrondis). De ces 70’000 véhicules, 20'000 ignorent la jonction de Rouelbeau, passant directement du Vengeron à la jonction de Puplinge, 50'000 passent par la trémie que laisse apparaître le photomontage, 25'000 pour rejoindre l’autoroute, et 25'000 pour la quitter. A titre de comparaison, 50'000 véhicules par jour, c’est le actuel trafic du Pont Butin, presque celui du pont du Mont-Blanc (60'000). La disposition prévue par l’administration est bien chétive pour absorber pareil trafic (le recours à la litote devient une nécessité). L’image est apaisante, mais trompeuse.

     

    De ces 50'000 véhicules par jour qui traversent le lac soit pour sortir de l’autoroute à Rouelbeau soit pour y entrer, 21'000 concernent le Bord du lac, Vésenaz, Collonges-Bellerive, Corsier, Anières et Hermance, 17'000 la France, Douvaine, Thonon, 5'000 Meinier, Jussy, 7'000 Les Eaux-Vives, Genève. A ces trafics s’ajoutent les trafics touchant ces zones et communes sans traverser le lac, en particulier ceux qui s’établissent entre ces communes et toute la rive gauche de la Ville.

    Pour en savoir plus: www.gerer.ch