Genevoises et Genevois, vos autorités et vos administrations en charge des transports ont négocié avec la Confédération le contrat suivant : Berne s’engage à dépenser à Genève 1,1 milliard si Genève s’engage à y dépenser 550 millions pour payer un lourd projet d’infrastructure ferroviaire : la construction d’une nouvelle gare, souterraine, à Cornavin.
Genevoises et Genevois, vous ne le savez peut-être pas, depuis février 2014 c’est la Confédération, elle seule, qui paie l’entier des nouvelles infrastructures ferroviaires. Alors, me demanderez-vous, pourquoi Genève devrait payer le tiers de ce que coûte cette nouvelle gare souterraine à Cornavin ? Voici :
- parce que Genève s’est d’abord entendue avec Berne pour une solution d’extension en surface de la gare de Cornavin, coûtant 790 millions, sans faire l’objet d’aucune consultation démocratique du Grand Conseil ni du Conseil municipal de la ville de Genève, ni a fortiori des citoyens et des habitants, ce qui a eu pour conséquence plus tard de vous pousser, vous Genevoises et Genevois, à refuser, à juste titre, ce mauvais projet,
- parce que c’est sur cette base de 790 millions que le Parlement fédéral a décidé de payer l’extension de la capacité du nœud ferroviaire de Genève,
- parce que la marge de manœuvre financière dont dispose l’administration fédérale par rapport à un crédit voté par le Parlement est limitée à environ 30 %.
Ce sont donc, très clairement, l’incurie et le déni de démocratie des autorités et des administrations genevoises en charge des transports qui font que Genève devrait aujourd’hui dépenser plus d’un demi-milliard pour une extension du réseau ferroviaire.
Un magistrat et quelques députés (également fonctionnaires) clament leur satisfaction de pouvoir espérer que la Confédération accepte de dépenser 1,1 milliard à Genève. Une consolation ? un argument pour sauver l’honneur des autorités et administrations en charge des transports à Genève ? A l’évidence non, c’est au contraire une preuve supplémentaire de l’incurie de ces dernières : auraient-elles agi en 2010 comme il faut, Genève disposerait aujourd’hui déjà, grâce à la boucle de l’aéroport originellement prévue, d’un réseau ferroviaire de grande qualité, bien supérieure à ce qu’offrirait l’extension souterraine de Cornavin, sans avoir déboursé un centime, sans avoir eu à supporter des chantiers pendant des décennies en plein centre fonctionnel de la ville, sans que ces chantiers dégagent des millions de tonnes de CO2.
Toute cette dérive fonctionnelle s’achèvera lorsqu’elle se fracassera contre les écueils de la réalité, lorsque Genevoises et Genevois apprendront enfin le désastre qui leur est promis, malgré l’omertà qu’auront fait régner pendant une dizaine d’années les autorités et administrations en charge des transports, lors des procédures d’enquêtes publiques et des procédures d’expropriation. Il y aura certainement à ce moment-là assez de personnes sensées et honnêtes pour s’opposer à de tels agissements. Et ce sera la justice, probablement fédérale, qui tranchera.
Genevoises, Genevois, la crise du Covid risque d’entraîner la disparition de nombre d’entreprises commerciales et culturelles, la faillite d’indépendants, à moins que l’Etat n’intervienne pour les aider à traverser ce passage difficile. Les 550 millions que le Conseil d’Etat et les fonctionnaires en charge des transports veulent jeter par les fenêtres pour sauver leurs images seraient ainsi certainement mieux utilisés.